POINTS DE BASCULE
Texte et mise en scène Sarah Pèpe
Création 2022
NOTE D'INTENTION
J’avais lu l’ouvrage de Marlène Benquet, Les damnées de la caisse, qui relate une
grève des hôtesses de caisse dans un hypermarché.
Cela m’avait beaucoup intéressée, notamment les conséquences sur les conditions de travail des nouvelles formes de gouvernance mondialisées. La crise sanitaire et la "découverte" soudaine des métiers essentiels, féminisés et précarisés m'a convaincue d'écrire sur le sujet. Au même moment, je pensais à raconter comment parfois une phrase, un geste, un acte peut influencer une vie. Alors les deux lignes se sont mélangées, et j’ai inscrit l’histoire d'une révolte d'hôtesses de caisse dans une relation entre deux sœurs qui se retrouvent des années après que l’une ait brutalement quitté le domicile familial, et qui finissent par se révéler un secret, que chacune croyait détenir, et qui a profondément influencé leurs trajectoires.
C'est un incident survenu au sein de l'hypermarché qui déclenche un mouvement de révolte, lequel va se durcir face aux refus successifs de la direction. A travers
l'opposition entre les deux soeurs, se dessine deux façons d'appréhender les
événements. Si la violence des grévistes est dénoncée, c'est une autre violence qui se donne à voir sur le plateau : celle des actionnaires anonymes qui engagent une répression féroce.
Dans ce système, les cadres intermédiaires deviennent les relais de cette violence, d'abord par l'instauration de procédures et de conditions de travail qui broient les corps et les existences, puis par la mobilisation des forces de police et des institutions judiciaires.
La couverture médiatique, à la recherche de sensationnalisme, déploie une autre violence, par l'instrumentalisation de l'événement et les significations différentes qu'elle produit, au gré de ses intérêts.
Comment réussir à lutter pour ses droits dans un système aussi brutal ?
Sarah Pèpe
>> Samedi 15 avril 2023 à 20h30 & Dimanche 16 avril à 16h
Théâtre de l'Abbaye, Saint-Maur-des-Fossés (94)
>> Du 26 mai au 5 juin 2022
Théâtre de la Manufacture des abbesses, 75018 Paris
Les jeudis, vendredis, samedis à 21h, les dimanches à 17h
Bord plateau jeudi 2 juin : rencontre avec Marlène Benquet
Sociologue, chargée de recherche au CNRS, membre de l’Institut de recherche interdisciplinaire en sciences sociales (IRISSO), ses travaux portent sur la grande distribution et l’univers de la finance internationale. Elle sera l'invitée de Sarah Pèpe à l'issue de la représentation.
Crédit photo : Photothèque Rouge/JMB.
Quand les riches volent les pauvres, on appelle ça les affaires.
Quand les pauvres se défendent, on appelle ça de la violence.
Mark Twain
Texte et mise en scène Sarah Pèpe
Avec Sarah Pèpe et Mayté Perea López
Création visuelle Jane Kleis / Création sonore Mélanie VanDanes
Production Compagnie Vent Debout
Diffusion Passage production
Après plus de 30 ans de séparation, une femme (Sœur 2) dans une situation difficile, vient solliciter sa sœur (Sœur 1), cadre dans la grande distribution, afin de lui demander un emploi. Celle-ci lui offre un poste de caissière au sein du magasin où elle travaille. Petit à petit, Sœur 2 va prendre conscience des conditions de travail de ses collègues et commencer à tenir un discours critique qui l’oppose à Sœur 1, dont elle dénonce les méthodes de rationalisation des procédures de travail.
Un jour, l’une des employées vole de la nourriture jetée par l’enseigne. La sanction portée par Sœur 1 tombe et va enflammer les caissières. C'est l'exclusion pour l'employée coupable.
En même temps que le mouvement de révolte, se raconte une autre histoire, celle des deux sœurs, sur fond de secret familial....
.................................................................................
A l'heure où on nous dit que l’image a valeur de preuve, j’ai eu envie de questionner cela :
Voir, est-ce accéder à la Vérité ?
Vérité familiale qui s'insinue entre les deux sœurs, cette question traverse également tout le mouvement de révolte des caissières.
Ce qui n’est pas vu agit
Toute la pièce déroule les conséquences d’actions non vues, qu’il s'agisse du secret familial, ou des véritables donneurs d’ordre, qui restent anonymes.
Voir n’est pas suffisant. Dès lors, la confrontation avec les autres visions devient une nécessité, afin d’accéder à un dessin plus global, qui modifie le sens.
A partir de ses textes (une dizaine de textes édités), Sarah Pèpe invente des spectacles autour de thématiques qui l’interpellent aujourd’hui, à travers des formes scénographiques plurielles, propices aux questionnements.
4 spectacles ont déjà vu le jour : "Domestiquées", "Les roses blanches" (texte lauréat du prix ado du théâtre contemporain 2019), "Les pavés de l’Enfer" (bourse Beaumarchais-SACD) et "Les Folles de la Salpêtrière et leurs sœurs", qui a reçu l’aide Beaumarchais-SACD mise en scène.
L'UNIVERS SONORE ET VISUEL
Le son : il est dissocié des vidéos. Même s'il reprend les différents univers des images, il ne colle pas à elles et se déploie dans sa propre accumulation.
Il raconte la vie du magasin. Mais de manière "trouée" comme le récit du passé des deux sœurs. Par exemple, on entendra une femme venir parler à sœur 1, pour
quelque chose d’urgent; on comprendra dans la scène suivante qu’elle était venue dénoncer la caissière qui a pris de la nourriture dans la poubelle.
Ou encore, après la scène de l’intervention policière sur le parking du supermarché, on entendra les voix des médecins qui accompagnent la naissance de la petite fille de la caissière enceinte, malmenée par les forces de l’ordre.
Il raconte comment les médias s’empare de cette histoire, pas forcément en lien avec les images. Il raconte la répression, les coups, la surenchère dans la violence.
Il fait entendre les paroles des femmes, écrites à partir de témoignages réels.
Il raconte enfin, à travers le téléphone qui n‘en finit pas de sonner le véritable commandement anonyme qui installe la violence et dresse les soeurs l’une contre l’autre et au-delà d’elles, font de SOEUR 1 la main qui exerce la violence. Personne ne sait qui commande vraiment, on n’entend pas leurs voix, on ne voit pas leurs visages, mais ils sont ceux qui donnent les ordres sans se salir les mains, au nom de leurs propres intérêts et en usant du chantage à l’emploi.
Au-delà de ces éléments « documentaires », l’univers musical, inspiré des bande-sons de thriller, racontera la tension et l’angoisse qui montent , et le climat de « guerre » qui s’installe.